Un semaine de vacances dans le golfe du Morbihan

J’aime lire Flaubert et Maupassant en Normandie, Maxence Van der Meersch allongée dans les dunes de Wissant et Modiano sur un banc des Tuileries. Mais le Morbihan reste un peu inexploré par les romans. Pourtant quelle belle matière, la mer, les îles, les rochers. La seule référence littéraire qui me vient à l’esprit, c’est Eugène Guillevic

« J’ai joué sur la pierre
De mes regards et de mes doigts

Et mêlées à la mer,
S’en allant sur la mer,
Revenant par la mer,

J’ai cru à des réponses de la pierre. »

Je me suis donc contentée de tester le livre numérique (kobo) qu’on m’a offert pour noël. J’entends les cris d’orfraie des amoureux du papier et pourtant…Quel bonheur d’emmener une centaine de livres dans sa valise sans se le faire reprocher par son mari qui n’arrive pas à caser ses 5 paires de chaussures ! J’avais téléchargé gratuitement des romans classiques, des polars, de l’« heroic fantasy » et de la poésie (quand on cherche un peu, l’offre est intéressante).

 Pour moi cette liseuse fonctionne un peu comme une bibliothèque de prêt. Si je lis un livre que j’aime, j’ai envie de l’acheter en support papier. Elle n’est pas vraiment concurrente du livre mais plutôt complémentaire. Elle a tenu sans avoir à la recharger pendant une semaine à raison de plusieurs heures de lecture par jour et m’a permis de passer sans complexe de Camilla Lackberg à Proust. De temps en temps, cette liseuse comme une maitresse à la distribution des prix m’octroie des récompenses ou des félicitations, pour avoir lu depuis plus de deux heures d’affilée, par exemple, ou pour avoir lu entre midi et deux en conjuguant les plaisirs de la table et de l’esprit, je ne sais pas s'il faut m'en réjouir!

Enfin, elle a remplacé un objet important pour moi « le livre de sac ».

 Le choix d’un livre de sac était particulièrement compliqué. Le livre devait être petit et pas trop épais et ne craindre ni le frottement, le froissement, l’usure ou les taches. Il fallait pouvoir le lire, l’abandonner, le reprendre, en fractionner sa lecture et reprendre sa page sans que cela nuise à la compréhension ou au plaisir. On ne songeait pas un instant à un roman policier, trop difficile à lâcher, ni à Guerre et paix ni, d’ailleurs, à un roman de Balzac. Même en « poches », ce n’était pas « des romans de sac ». Par contre un vieux recueil de poèmes qu’on s’était promis de jeter convenait très bien, la forme du haïku était particulièrement adéquate, utile quand on s’énervait dans une file d’attente mais un peu courte, quand même, pour combler le vide d’un rendez vous manqué. On pensait également à la nouvelle, aux aphorismes d’Epictète, précieux dans les transports en commun ou aux  Propos sur le bonheur  d’Alain qui nous donnait l’impression d’être très intelligente. Longtemps, j’ai mis dans mon sac les petits livres de la collection « Mille et une nuits » mais, désolée de les voir défraîchis au bout d’une semaine, tant la couverture et la mise en pages me semblaient jolies, j’y ai renoncé. Il convenait donc de choisir un livre dont le contenu valait plus que le support. Maintenant avec une liseuse, plus de souci c’est une petite bibliothèque qui est à disposition avec, toujours, le livre qui convient à l’instant présent.  Mon seul regret face à ces livres numériques, c’est qu’ils nous privent d’essayer de deviner ce que lit notre voisin dans le train ou le métro. On avait tant de plaisir à découvrir que cette petite dame bien comme il faut, aux cheveux discrètement bleutés, lisait Les particules élémentaires...

Et voici la preuve qu'on peut aimer sa liseuse numérique ET ses livres "papier"!

# Je dis