lu et approuvé
Pas le chef d'oeuvre attendu mais un livre d'Emmanuel Carrère n'est jamais anodin. La réussite c'est d'avoir interrogé "ceux pour qui ça ne va pas comme ça, qui ne se sont jamais remis d'une espèce de stupeur qui leur interdit de vivre sans se demander pourquoi ils vivent, quel est le sens de tout cela s'il y en a un. L'existence pour eux est un point d'interrogation et même s'ils n'excluent pas qu'à cette interrogation il n'y ait pas de réponse, ils la cherchent, c'est plus fort qu'eux. Comme d'autres l'ont cherché avant eux, comme certains, même, prétendent l'avoir trouvée, ils s'interresse à leurs témoignages. Ils lisent Platon et les mystiques, ils deviennent ce qu'on appelle des esprits religieux." Cette enquête foisonnante et touffue est parfois difficile à suivre à cause d'un parti pris très subjectif. Il m'a fallu consulter mon nouveau testament bien des fois. Ce qui m'a un peu gênée, ce n'est pas, comme on lui a reproché ses tendances à l'auto fiction, ses allers-retours sur ses propres expériences, bien au contraire, mais c'est ce schéma, cette construction répétitive qu'il a tendance à appliquer à tous ses livres. C'est, à mon avis un grand auteur, mais il y a là un peu de facilité.
Nancy Huston livre un récit autobiographique qui suit par paragraphes courts le cheminement des évènements de son histoire chaotique, évènements qui la mèneront à l'écriture. C'est un récit jamais complaisant d'un style magistral dans son épure et dans la distance qu'elle arrive à tenir avec son sujet. Très beau livre, très belle couverture....
Récit d'une manipulation sur le campus de Cambridge. Un étudiant charismatique et bien né, Eden Bellwether affirme qu'il peut soigner grâce à la musique. Face à lui l'aide soignant fasciné mais septique d'une maison de retraite va tenter par amour pour Iris la soeur d'Eden de prouver son déséquilibre et la supercherie ....Un livre qu'on ne lâche pas malgré, parfois, la sensation que l'auteur aurait pu aller beaucoup plus loin, tant le sujet est passionnant. Les couvertures des éditions Zulma sont un plaisir à elles seules!
Retour de Bridget, telle qu'en elle même, bien que veuve avec deux enfants! Helen Fielding ne se renouvelle pas, ce n'est qu'une déclinaison de ses deux autres livres mais je me suis laissée prendre, j'ai beaucoup ri, je suis bon public. Il faut dire que Bridget, c'est quand même notre soeur à toutes. Ne dépensez peut être pas 20 euros pour l'acheter, empruntez le.....
Enfin, je n'ai pas encore lu le dernier Modiano mais j'ai été touchée qu'il ait eu le Nobel, pour le "sfumato modianesque" et l'errance géographique et poétique dans les rues de Paris, bien sur, mais aussi pour l'extrême timidité et modestie du personnage qui me touchent.
Mais si vous n'avez lu ni "Rue des boutiques obscures" ni "Dora Bruder" ni "Remise de peine" ni "Dans le café de la jeunesse perdue" (pour moi, les meilleurs) Lisez ce livre dont personne n'a parlé et qui résume un peu l'art de Modiano, "Catherine Certitude" roman pour enfants illustré par Sempé. C'est un livre merveilleux où l'univers de Modiano répond à la délicatesse et à la poésie du dessin de Sempé.
Et si vous ne croyez pas qu'en lisant un livre pour enfant, on peut saisir ce qu'est l'univers de Modiano, voici le dernier paragraphe:
"Hier dimanche, avec ma fille, j'ai rendu visite à mes parents, du côté de Greenwich Village. Ils se sont réunis une fois pour toutes, bien que maman ait souvent menacé de s'en aller, car elle était lasse "des combines de papa"_ comme elle le disait avec son accent américain. Mr Smith, le nouvel associé de papa, qui est aussi tatillon que l'était , Mr Casterade, partage entiérement l'avis de maman. Le taxi nous a déposées au pied du grand immeuble de brique où ils habitent. Là haut, à l'une des fenêtres de leur appartement, j'ai distingué la silhouette de papa. Il m'a semblé qu'il nouait sa cravate. Peut être disait-il: _A nous deux, madame la vie"
#je dis