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La semaine des 4 jeudis
10 juillet 2014

L'opéra sauvage de Tim Willocks

 

Après le siège de Malte par les turcs, sujet du précédent roman de l'auteur, "La Religion", nous suivons Mattias Tannhauser qui cherche à rejoindre sa femme à Paris le 23 août 1572, la veille du massacre de la saint Barthélémy.

Penser que Tim Willocks à l'image d'Alexandre Dumas ("La reine Margot") ou de Robert Merle ("Paris, ma bonne ville", excellent roman un peu oublié) a écrit un roman historique me semble une erreur, même si les évènements du mois d'août 1572 servent de toile de fond à son intrigue. Nous sommes plus dans une épopée mythologique à l'image de "L'iliade" avec laquelle ce roman partage plusieurs points communs. En effet, par Mattias, sorte de héros du carnage, l'univers plus ou moins ordonné de la situation historique ( protestants et catholiques rassemblés à Paris pour le mariage d'Henri de Navarre avec la fille de Catherine de Médicis) va basculer dans un chaos sauvage. Il n'y a plus de combat loyal mais extermination. Il n'y a plus de cadre, plus de mesure.

La violence des descriptions de cette extermination est extrême, voire insoutenable.

"Tannhauser frappa le pèlerin suivant dans les reins et l'ouvrit jusqu'à l'omoplate, avant de relever son arme pour faire voler l'épée du dernier de la rangée. Il accentua sa poussée, pivotant sur la hanche, lui découpa le côté du visage jusqu'à la narine opposée. Il roula la hampe de sa pique à deux mains, comme s'il remontait l'eau d'un puits, et sentit le craquement quand la lame sépara la mâchoire inférieure du reste de sa tête, comme une palourde obstinée. La spontone glissa, libre, lorsqu'il recula, et il embrocha le pèlerin dans le sternum, le souleva et le balança dans les jambes de la mêlée."

Si ces quelques lignes vous donnent la nausée, vous ne saurez pas lire "Les douze enfants de Paris" Pourtant cette violence concoure à faire du récit une prouesse littéraire, une sorte de cauchemar halluciné, une boucherie symbolique où l'adversaire n'est réduit qu'à un corps à dépecer. La violence sous toutes ses formes est interrogée, comme moteur de l'histoire, comme corollaire du fanatisme, comme archétype de la survie, comme origine de la vie puisque Carla, la femme de Mattias accouche au milieu de cette furie mais aussi comme seul faire valoir à l'amour qu'il éprouve pour elle, entre souillure et rédemption. 

La fin du roman atteint un tel paroxysme qu'elle nous mène dans une symbolique de l'enfer. Dans une barque, les survivants de l'épopée, les douze enfants, tentent de sortir de Paris entre les flammes par la Seine rouge de sang.

Il y a aussi dans ce roman du Victor Hugo de "Notre Dame de Paris", une cour des miracles, des personnages secondaires très "typés" dont un "Quasimodo", roi de cette cour,  qui se sacrifiera par amour. L'univers de Tim Willocks montre un goût certain pour le "gothique".

Si je ne vous ai pas découragés, sachez quand même qu'il est impossible de refermer le livre avant d'en connaître la fin, c'est un vrai "page turner" à condition d'avoir le coeur bien accroché et de lire cette violence en prenant le recul du symbolique. L'écriture est fluide, concise et poétique. C'est un roman étonnant.

 

Mais que faisait l'auteur avant d'écrire, était il boucher? Ha, non chirurgien.......d'accord....

 

#je dis

 

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Commentaires
P
Voici qui va plaire à mon cher et tendre! Merci pour la découverte! Je vois son nom dans toutes les librairies (Chirurgien, lui? Il pourrait avoir le rôle du méchant dans un film des frères Coen!)
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